Pourquoi est-il si difficile pour la police de localiser une voiture volée, pourtant équipée d’un système de géolocalisation ?
Malgré l’équipement GPS de la plupart des voitures récentes, les chances de retrouver un véhicule volé s’effondrent après 48 heures. Entre brouilleurs GPS accessibles en ligne, cachettes stratégiques et délais administratifs liés au RGPD.
Le vol de voiture est un sujet qui préoccupe jusque dans les allées du ministère de l’intérieur. Entre 2021 et 2023, les vols de véhicules ont augmenté de 14% en France. Avant que la tendance se stabilise en 2024 avec une légère baisse de 1%.
En cause, les techniques de vol se sont sophistiquées au point que les voleurs disposent désormais de matériel et de connaissances suffisantes pour contourner les nouveaux systèmes anti-vol, y compris ceux équipés de technologie connectée. Pour autant, la majorité du parc automobile moderne est équipée de systèmes de géolocalisation embarqués. N’est-ce pas suffisant pour retrouver un véhicule ?
Passer la publicitéDans les faits, ce n’est pas si simple. Selon une note de l’institut Choiseul, après 48 heures, les chances de retrouver un véhicule volé diminuent de 60%. Coyote, l’un des acteurs privés de la protection contre le vol de véhicule, estime même que passé 48 heures, les chances de récupérer le véhicule sont divisées par dix.
D’abord, les réseaux criminels ont développé des stratégies spécifiques pour contourner la géolocalisation avant que les autorités ne puissent réagir. Les brouilleurs GPS représentent l’arme la plus sophistiquée des voleurs modernes. Ces appareils, accessibles pour quelques dizaines d’euros sur Internet, émettent un signal qui interfère avec les signaux GPS, empêchant ainsi le traceur de fonctionner correctement. L’Agence nationale des fréquences (ANFR) a d’ailleurs documenté plusieurs cas où des brouilleurs étaient utilisés pour contourner les dispositifs de traçage des véhicules, dans le but de faciliter le vol de ces derniers.
Autre technique, les voleurs de voitures stockent stratégiquement les véhicules volés dans des endroits où la réception GPS et GSM sont faibles ou inexistantes : parkings souterrains, conteneurs métalliques, entrepôts isolés. Très vite, les réseaux criminels organisés agissent. Les véhicules volés sont immédiatement acheminés vers les ports, principalement celui du Havre, où ils sont chargés dans des conteneurs, rapportait-on au Figaro en 2023. Certains véhicules ne sont jamais exportés entiers. Ils sont désossés rapidement pour être revendus en pièces détachées.
La fenêtre de tir pour retrouver un véhicule volé est donc très étroite. Seulement voilà, la localisation des véhicules volés «s’inscrit dans un cadre judiciaire strict, notamment en lien avec le Règlement général sur la protection des données (RGPD)», indique le ministère de l’intérieur.
Sauf que ce cadre impose «un recours judiciaire qui dépasse souvent 48 heures pour permettre la collecte et l’utilisation des données de géolocalisation des véhicules», plaide Hervé Maurey, sénateur centriste de l’Eure dans une question parlementaire au gouvernement. Le ministère de l’intérieur confirme cette difficulté, le consentement explicite du propriétaire étant en principe requis par le RGPD, «cela peut ralentir leur mise à disposition pour les forces de l’ordre».
Passer la publicitéPour autant, le Plateau d’Investigations sur les Véhicules (PIV) du pôle judiciaire de la gendarmerie nationale a conclu des partenariats avec des sociétés privées pour renforcer ses capacités de géolocalisation. Par exemple, avec Coyote, qui propose aux automobilistes des boîtiers supplémentaires, dissimulé dans le véhicule et résistant aux systèmes de brouillage.
Mais, c’est surtout en amont que le Gouvernement assure travailler «sur plusieurs évolutions utiles pour pénaliser plus sévèrement la conception, la détention et la diffusion de matériel de reprogrammation de clés utilisé hors du marché légal». À suivre.
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