Domenico De Rosa : « Le pont manquant nous coûte plus cher que celui que nous construisons : le prix élevé de l’inaction. »

Domenico De Rosa , PDG du groupe SMET et entrepreneur en logistique, est un fervent partisan de la construction du pont sur le détroit de Messine . Dans une interview, De Rosa expose sans détour sa vision du projet, critiquant l'échec de la construction d'une infrastructure qu'il considère comme cruciale pour l'avenir économique du sud de l'Italie et de l'Italie tout entière.
« Le pont du détroit n'est pas seulement une infrastructure, c'est une opportunité que nous ne pouvons plus nous permettre d'ignorer », commence De Rosa. « Chaque année, 800 000 véhicules lourds traversent le détroit, entraînant des coûts directs de ferry dépassant les 200 millions d'euros . À cela s'ajoutent les inefficacités liées aux temps d'arrêt, qui portent le coût annuel bien au-delà d'un milliard d'euros. Si l'on ajoute à cela la prime logistique que la Sicile paie par rapport au reste du pays, estimée à environ 10 % , il est clair que cette situation est intenable . » Et d'ajouter : « En Italie, nous sommes souvent passés maîtres dans l'art de transformer l'évidence en éternel débat idéologique. Le pont du détroit, plus qu'une infrastructure, est devenu le symbole national de ce que nous ne parvenons jamais à achever, malgré le potentiel transformateur que nous connaissons depuis des décennies . »

Le chevalier poursuit en soulignant les problèmes concrets découlant de l'absence de liaison stable entre la Sicile et le continent : « La compétitivité ne se construit pas avec des proclamations, mais avec la capacité à transporter des biens et des personnes rapidement, de manière prévisible et à des coûts soutenables. L'absence de pont entre la Sicile et la Calabre fait de l'île une enclave, coupée des principaux flux logistiques européens. La marginalité ferroviaire, avec seulement deux ou trois trains de marchandises par jour, sanctionne l'exclusion de la Sicile du corridor RTE-T Scandinavie-Méditerranée, qui constitue l'un des piliers stratégiques de l'Europe . »
Face aux nombreuses objections qui continuent d'émerger concernant la construction du projet, Cavaliere De Rosa est clair : « On entend encore aujourd'hui parler de "priorités différentes" ou de "routes à réparer en priorité", comme si c'étaient des excuses à l'inaction. C'est une erreur. Le pont ne remplace rien, il permet tout. Sa construction résoudrait non seulement les problèmes liés au trafic maritime, mais encouragerait également la construction d'ouvrages annexes – routes, nœuds ferroviaires, interconnexions – qui stagnent actuellement dans les limbes de la planification . »
Concernant le coût du projet, qui a souvent fait l'objet de discussions, De Rosa souligne : « Le coût du pont est estimé à environ 13,5 milliards d'euros , répartis sur dix ans. Mais la véritable question que nous devons nous poser est : combien cela nous coûte-t-il de ne pas l'avoir ? Chaque année, nous perdons une somme équivalente à ce montant en inefficacités et en coûts logistiques . »
L'entrepreneur ne cache pas sa frustration face à l'incapacité politique à mener à bien le projet, malgré son potentiel évident : « Nous sommes un pays du G7, doté d'une industrie d'ingénierie de classe mondiale. Nous construisons des ponts et des tunnels dans des contextes bien plus complexes que celui du détroit. Il ne fait aucun doute que nous en sommes capables. Pourtant, sur ce grand projet unique et irremplaçable, nous restons stagnants, craintifs et désunis . »
Pour Cavalier De Rosa, la question du pont du détroit de Messine n'est pas seulement locale, mais concerne tout le pays : « Le Sud a besoin d'infrastructures transformatrices, pas de petites mesures provisoires. La Sicile doit s'intégrer pleinement au système logistique européen, et non rester isolée. Ce n'est pas une question d'identité, mais d'efficacité. Ce n'est pas une question d'idéologie, c'est une question de logique industrielle. »
Enfin, le Chevalier conclut par un appel aux politiciens et à la classe dirigeante : « Chaque jour passé sans le pont est une occasion manquée pour l’économie du pays. Ce pont est une œuvre d’ingénierie appliquée à l’avenir. Ne pas le construire aujourd’hui est un choix, et ce choix a un prix que nous payons déjà très cher . »
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