Pourquoi Leclerc sera le seul distributeur absent autour de Karine Le Marchand au Salon de l'agriculture

Carrefour, Les Mousquetaires, Auchan, Casino, Coopérative U... Les patrons des grandes enseignes françaises de grande distribution seront tous là ce mercredi à 9 heures au Salon de l'agriculture autour de l'animatrice Karine Le Marchand.

Tous ou presque. Lidl, sans porte-parole attitré depuis le départ de Michel Biero, n'aura pas de représentant sur l'estrade. Mais c'est l'absence d'un autre patron -et non des moindres- qui interpelle: celle de Michel-Edouard Leclerc. Le champion français du secteur avec près de 25% de part de marché va pratiquer la politique de la chaise vide.

Alors que les grandes enseignes de l'alimentaire vont annoncer trois actions pour soutenir l'agirculture française, Leclerc n'a pas jugé opportun de s'associer avec ses concurrents.

"Je n'ai rencontré Karine Le Marchand qu'une fois parce qu'on était le premier distributeur de 'C’est qui le patron ?!' et elle a proposé cette initiative, expliquait il y a deux semaines sur BFMTV le distributeur. Avec des collègues on a pensé que si je faisais ça on aurait dit que c'était de la com'."

Fidèle à sa stratégie de cavalier seul qui l'avait déjà conduit à refuser de participer au "trimestre anti-inflation" proposé par Bercy en 2023, Michel-Edouard Leclerc ne souhaite pas apparaître sur la photo avec ses petits camarades.

Le plus médiatique des patrons de France craint-il vraiment d'être taxé de faire de la "com'"? C'est sans doute en partie vrai. Comme il l'expliquait mi-février, ce n'est pas au Salon de l'agriculture que se prennent les décisions business avec le monde agricole.

"C'est une vitrine, ce n'est pas le débouché de l'agriculture, rappelle-t-il. Toutes les initiatives nous les avons déjà prises. Les alliances locales nos concurrents vont les annoncer, nous on en a 15.000 avec Daucy, avec Bonduelle, avec leurs fournisseurs en légumes... Je ne vais pas aller au Salon de l'agriculture annoncer ce que nous faisons depuis 15 ans."

Michel-Edouard Leclerc rappelle par ailleurs que son enseigne a participé à la création de la marque Produit en Bretagne qui met en avant le savoir-faire agroalimentaire des entreprises de la région. Ce sont des annonces similaires qui devraient être faites ce mercredi avec Karine Le Marchand.

Mais il y a peut-être des raisons moins avouables à cette absence du distributeur. Il l'a d'ailleurs reconnu à demi-mot sur BFMTV en pointant "le climat où on nous attribue de faire pression sur les agriculteurs". Une accusation qu'il rejette par ailleurs affirmant que ses magasins n'étaient pas plus pris pour cible que les autres lors du précédent mouvement des agriculteurs.

Il n'empêche, Leclerc se sait dans le collimateur avec sa centrale d'achat européenne Eurelec accusé de contourner la loi française sur les négociations commerciales. La société a d'ailleurs écopé en août dernier d'une amende de 38 millions d'euros de la part de la DGCCRF pour des manquements en la matière.

Certes, Leclerc n'achète pas via cette centrale d'achat commune avec l'allemand Rewe des produits agricoles français. Mais elle est perçue par le monde agricole comme une manière de contourner la loi censée les protéger en sanctuarisant les matières premières.

Si Leclerc n'est pas le seul à avoir une centrale d'achat européenne, il cristallise de par sa position de leader les mécontentements du monde agricole vis-à-vis de ces sujets. Donc pas question pour lui de monter sur l'estrade et de risquer d'entendre des sifflets et des huées. Ce qui n'est assurément pas de la bonne "com'".